Franc-maçonnerie et monde séfarade : entre intégration et stigmatisation

La Franc-maçonnerie, fondée à Londres en 1717, se voulait un espace d’universalité et d’intégration au-delà des clivages sociaux et religieux. Cet idéal séduisit les Juifs séfarades, souvent marginalisés, qui y trouvèrent une voie d’émancipation. Dès le XVIIe siècle, des figures comme Yehuda Yacob León influencèrent symboliquement l’ordre par des références au Temple de Salomon. Les Constitutions de 1723 ouvrirent les Loges aux Juifs, permettant l’intégration de personnalités séfarades. L’expansion maçonnique vers l’Égypte, la Terre Sainte et l’Amérique renforça l’idée d’universalité et de retour spirituel aux origines.

Au XIXe siècle, l’alliance supposée entre Juifs et Francs-maçons alimenta le mythe du « complot judéo-maçonnique », utilisé par la propagande catholique et franquiste. Pourtant, les Loges séfarades, souvent hispanophones, enrichissaient l’Ordre par leur héritage kabbalistique et linguistique, le ladino jouant un rôle central. Ces Loges devinrent des espaces de solidarité pour des communautés dispersées ou persécutées, comme à Thessalonique en 1904, où Juifs, Grecs, Arméniens et Musulmans se retrouvèrent dans un esprit fraternel.

La Franc-maçonnerie séfarade se diffusa en Espagne, aux Antilles, au Mexique et jusqu’en Amérique latine, servant de refuge aux exilés et de lieu d’intégration culturelle. Toutefois, l’oubli de certaines traditions entraîna parfois des dérives sociales. L’héritage séfarade s’exprime aussi dans l’architecture et les cimetières, où abondent symboles maçonniques et kabbalistiques.

Cette histoire révèle une tension constante entre intégration et stigmatisation, mais aussi une symbiose unique entre identité séfarade et quête spirituelle maçonnique. Elle témoigne d’une fraternité forgée dans l’adversité et gravée dans la mémoire collective.

Source :   du site enlacejudio.com – Par Maria José Arevalo Gutierrez